hectares
% de syrah
passage en bio

Au sud de Narbonne, se trouve la pépite bio et biodynamie de la plus grande winery de France. Le Château Notre Dame du Quatourze est un peu la carte verte des 1780 hectares des domaines et châteaux du groupe Vinadeis. “Je suis en agriculture raisonnée depuis vingt ans, en bio depuis 1998, et j’ai commencé la certification en biodynamie en 2011”, déclare Georges Ortola, l’heureux propriétaire d’une centaine d’hectares répartis sur six vignobles.

L’histoire

“A notre retour d’Algérie, en 1963, mon père avait cherché des vignes, poursuit-il, mais les prix dans la plaine de Narbonne étaient plus chers que dans l’Entre-deux Mers. Il avait quitté Misserghin, à 40 kilomètres d’Oran, n’ayant pu emporter avec lui que la grande statue en plâtre de la Sainte Vierge de son village, et lorsqu’il a vu que Notre Dame du Quatourze était à vendre, il a cru à un signe du destin”. Un choix qui se révèle ancré dans un passé encore plus lointain, lorsqu’il découvrira au coin des vignes qu’une borne en étrusque signale la tombe d’un aruspice.

Ce prêtre chargé de prédire l’avenir du temps de l’Empire romain n’a même pas eu besoin d’annoncer la conversion en bio des vignes enracinées depuis l’Antiquité, puisqu’il s’agit d’un véritable retour aux origines. Il faut dire que les 220 jours par an de tramontane, un vent venu de la terre, assurent une ventilation naturelle. Tandis que l’été, un vent de mer chaud favorise la maturité. “Mildiou, botrytis, connais pas”, rigole Georges Ortola, en plissant des yeux qu’il a en pattes d’oie.

Un compost maison à base de marc et de fumier

Après avoir planté quelques oliviers, et une paire de néfliers au parfum anisé, c’est sur la vigne qu’il continue à se pencher sans relâche. Le sol est argilo-calcaire, et parsemé de galets roulés, gage de grands vins. Il est enherbé un rang sur deux d’avoine et de vesce. L’autre rang est laissé aux herbes folles, tel un tribut à la biodiversité. Cela peut paraître un détail, mais cela montre que la famille Ortola ne veut pas tomber d’un excès dans l’autre. Une vraie pratique bio, sans jusqu’auboutisme, réfléchie et précise.

En revanche, les Ortola n’ont eu de cesse d’agrandir, après avoir acquis le Château Tapie de Celeyran en 1983, ancienne propriété d’une Tapié de Celeyran  (Le nom de Celeyran a été donné à un autre domaine autrefois propriété de la même famille) ils ont fait l’acquisition de celui de Lunes cinq ans plus tard. “Quand je l’ai acheté, le domaine avait un rendement de 10 hl par hectare, se souvient Georges Ortola, aujourd’hui nous sommes au dessus des quarante hectolitres, car le vignoble a été restructuré”. Nous en parcourons les vignes, où bientôt une soixantaine de moutons reviendront se répartir entre les rangs, et enrichir naturellement le sol de leurs fumures. Un compost maison est en outre fabriqué, à base de marc de raisin et de fumier de bovin, c’est le seul apport extérieur que reçoit la vigne. “Associer le végétal à l’animal”, c’est une partie de la recette bio du Château Notre Dame du Quatourze.

On vendange selon un agenda biodynamique

L’encépagement global est en majorité composé de syrah à 60%, avec 20% de grenache, 10% de mourvèdre, et autant de carignan. Sans oublier le vermentino et le viognier, pour les blancs, ainsi qu’un peu de roussane, la syrah blanche, qui vient d’être plantée. “Nous avons commencé à vendanger le 7 septembre, et tout terminé le 28, à la machine. Avec deux machines, même, ce qui permet de coller au plus près des maturités”. Les dates ont été choisies, après dégustation et analyse, et en fonction d’un agenda biodynamique. “En cave, je n’utilise aucun sulfite, sauf à la fin des fermentations malolactiques, et toujours avec des doses les plus basses possibles”, souligne-t-il, en s’adressant à Olivier Dauga.

“Le Faiseur de vin”, c’est le nom de la société d’Olivier Dauga, conseille Vinadeis depuis 2013, et l’apport de ce winemaker est déterminant pour faire évoluer les habitudes. Dans le domaine technique et commercial, notamment. Il connait la demande changeante des marchés, et peut donc faire bouger les lignes dans les chais. En douceur, car cet ancien joueur de rugby sait qu’un viticulteur ne se bouscule pas comme un pack de Kiwis.

“Viticulteur, c’est déjà assez compliqué, vendre le vin, c’est un autre métier, et je préfère me concentrer sur le mien”, explique Georges Ortola. Dans son grand cuvier en béton thermo-régulé, Olivier Dauga a isolé de plus petites cuves de 30 hl, après avoir zoné les meilleures parcelles. L’élevage se déroule ensuite dans des barriques pour la plupart française et de chêne blanc du Missouri, neuves d’un vin, qui sont par la suite assemblées ou non et pour le reste en cuve, afin que le fruit l’emporte toujours sur le bois. Un second assemblage aura lieu, enfin, entre ces trois éléments, au bout de 10 à 12 mois.

“Viticulteur, c’est déjà assez compliqué, vendre le vin, c’est un autre métier,
et je préfère me concentrer sur le mien”

A 57 ans, il n’est pas prêt de passer la main, mais ses deux enfants lui ont déjà manifesté, “par écrit”, précise-t-il leur volonté de prendre sa suite. Les rôles semblent même répartis. Hélène, 25 ans, diplômée d’un Master en droit, se chargera de la partie administrative et de la vinification, et Nelson, 28 ans, diplômé en gestion des espaces naturels, s’occupera de la partie technique concernant la culture de la vigne et la gestion des sols ainsi que de la vinification. Et quand on lui demande s’il n’est pas inquiet du réchauffement climatique, il répond sans s’inquiéter, “être vigneron consiste précisément à gérer les aléas de la météo, nous avons plus de vents de mer frais qu’autrefois, et si nécessaire, on vendangera plus tôt”, sourit celui qui vit au Château YMYS, 10 hectares acquis en 2012, en face de l’étang de Bages qui s’étend sur le seuil de la Méditerranée.

Les vrais amateurs connaissent cette AOP Languedoc Quatourze, dont le château appartenait jadis à l’archevêché de Narbonne. Les imposantes tours de la cathédrale émergent au dessus des vignes, tels un vestige de l’impôt correspondant au quatorzième de la récolte dû par les paysans, mais aujourd’hui ils ont repris l’avantage sur le clergé, et il ne reste plus que ce nom de Quatourze auquel la famille Ortola a redonné sa fierté. Comme quoi le Langudeoc, plus grande région viticole de France, est capable de conjuguer au présent la qualité, et même d’y ajouter le label bio et biodynamie.

Notre-Dame du Quatourze en images

Georges Ortola : ``un vignoble est toujours en devenir``

Château Notre-Dame de Quatourze

Dégustation

2013

Rond, gras, fruits noirs et épices, bouche chaleureuse, avec un tannin assez enrobé. La finale est puissante et doit encore s’affiner.

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